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Le blog de T-H-A

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Des droits, toujours des droits. Parlons-en !


La téléréalité à l'agonie ?

Publié par T-H-A sur 24 Mars 2009, 13:42pm

Catégories : #Digressions juridiques

      Depuis Loft Story, la téléréalité a envahi les écrans de télévision. Que ce soit pour décorer un appartement, devenir une nouvelle star de l’académie ou échanger des mamans dans un pré, elle est partout. On peut même entrapercevoir la télé de demain en regardant dans les autres pays des programmes où c’est la chirurgie esthétique qui vient au secours des vilains petits canards pour les transformer en Miss Swann (Melle Cygne). Rien ne semblait pouvoir arrêter ce qui est devenu une évolution majeure de la façon de faire de la télévision : un œil plus ou moins voyeur sur la vie des autres et leurs domiciles à l’abandon, ou la survie d’apprentis Robinson Crusoë sur une île tropicale. Tout a été dit ou presque sur les gains pour les sociétés de production : peu de moyens à mettre en œuvre, des candidats consacrant leur temps à une émission, pas de stars à rémunérer. Il y a même eu des conséquences inattendues : cela a créé un vivier de starlettes pas chères et sous contrat avec des chaînes qui viennent sur les plateaux télé pour meubler des émissions où on repasse des vieilles images cent fois rediffusées.

 

       Pourtant, la donne pourrait bien changer. En effet, les procès se multiplient, intentés par des anciens candidats qui réclament la requalification de leur contrat en contrat de travail. Et il faut avouer que leurs arguments vont créer une jurisprudence. Précisons avant tout propos que le contrat de travail est une notion assez floue en droit, comme toutes les notions clés. Il n’existe par exemple aucune définition de la preuve, alors même que c’est la clé de voûte de tout l’édifice. L’existence d’un contrat de travail se déduit de la réunion d’un certain nombre de critères, mais le principal est le lien de subordination existant entre l’employeur et le salarié. Pour être salarié, il faut aussi un salaire, mais ici il n’en est justement pas question pour les sociétés de production. Cela soulève des interrogations : les candidats de ces jeux étaient-ils sous la direction de quelqu’un ? Ils pouvaient à tout moment « quitter l’aventure », selon l’expression obligatoire de toutes les émissions, de leur plein gré ou selon  le cours du jeu. Les sociétés de production prétendent que c’est effectivement un jeu. Mais le Code civil est clair : le jeu en tant que contrat aléatoire, doit comporter une part de risque pour chacun des cocontractants. Or, pas de risque pour la production, puisqu’il s’agit de frais assumés : le gagnant reçoit un prix, point final.

 

       Ce qui pourrait heurter, c’est l’absence de pénibilité du soi-disant travail. Pour autant, ça n’est pas un critère. Ce n’est pas parce qu’un emploi ne demande que peu d’efforts, de diplômes ou de compétences qu’il n’en est pas un. Le travail à l’usine, aussi pénible soit-il, demeure autant un emploi que le fait de garder une grande maison avec tout le luxe possible pendant l’absence des propriétaires. C’est alors vers les obligations des potentiels employés-candidats qu’il faudrait se tourner. Et en effet, ils ont l’obligation de rester à des horaires déterminés, de se livrer à des prestations diverses et variées, sous peine de « quitter l’aventure », ou dit plus prosaïquement, se faire virer. On retrouve bien ici d’ailleurs les deux possibilités de rupture du contrat de travail, la démission et le licenciement, sauf que ce dernier n’est pas indemnisé en ce qui les concerne … Ce ne sont donc plus seulement des indemnités qu’il faudra leur verser, mais bien un salaire, ce qui relance la polémique sur le fait que ces « jeux » ne seraient que des mises en scène.

 

        Alors, à quoi devons-nous nous attendre ? A un beau déballage de saletés pour commencer : les candidats, les autres employés, cadreurs et autres accessoiristes se lâchent et sortent des anecdotes et des squelettes qui auraient dû rester dans les placards. A la fin de la téléréalité ? Il est vrai que les surcoûts engendrés par les salaires des participants auraient à l’avenir pour effet de limiter les ambitions créatives des « prod’ ». Mais le genre fait recette. On voit de plus en plus d’émissions faites avec très peu de moyens qui font recette. La téléréalité, loin des promesses de gloire des premières émissions, deviendra-t-elle un produit de consommation, entreposé entre un paquet de lessive et une bouteille d’huile ?

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