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Le blog de T-H-A

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Des droits, toujours des droits. Parlons-en !


Sonnez le glas, le juge d'instruction meurt avec une partie de nos libertés

Publié par T-H-A sur 13 Décembre 2009, 19:43pm

Catégories : #La mort du juge d'instruction

          La voici, la voilà, la réforme de la procédure pénale est dans les cartons. Cette réforme, qui fait suite aux délibérations rendues par la Commission Léger, conformes aux attentes du gouvernement et du Président qui en a nommé les membres, est prête à être présentée. Je fais déjà une petit parenthèse : quand on lance une commission en disant qu'il faut supprimer le juge d'instruction et que la commission rend des avis conformes à ce pour quoi elle a été créée, on est au niveau zéro de l'argumentation, et on se demande bien quelle a été l'utilité de créer cette commission. Même Frédéric Lefebvre aurait fait mieux. Mais je m'égare. Je ne vais pas en parler dans le détail, car je l'ai déjà fait avant ça, et Eolas aussi avec beaucoup plus d'expérience et de finesse.


           Mais je vais vous dire pourquoi cette réforme va passer. C'est un sujet assez aride, que j'ai essayé de rendre plus funky mais je dois avouer que même un juriste non pénaliste ne s'enthousiasmerait pas pour cette question. C'est une réforme véritablement scandaleuse qui se profile, avec une justice encore plus au rabais, et on se moque considérablement des droits de la défense, alors que tout est parti d'Outreau qui est un des meilleurs exemples de ce que la justice peut faire dans ce genre de cas, quand la présomption d'innocence est bafouée et que l'on se jette sur des personnes que l'on présume pédophile, violeur ou meurtrier. Ces gens-là, ce ne sont pas des lointains inconnus qui vivent dans un autre pays. Ils vivent en France, et ça aurait très bien pu être vous, charcutier à Brest, ou votre oncle, huissier de justice à Biarritz. Sur ce genre d'erreur, parce que l'on a voulu tellement bien faire que l'on en a mis de côté les droits de personnes dont on était persuadé de leur culpabilité, et que tout un ensemble de personnes très instruites, juridiquement au point et avec une vraie expérience du terrain (un juge d'instruction n'est jamais seul) en auraient mis leur main à couper, des personnes comme vous et moi ont passé des mois voire des années en prison, subi l'humiliation de la garde à vue, et vu les regards de toute leur communauté les assaillir, pour les traiter de monstres.

          Si vous ne voyiez pas ce que je veux dire encore, laissez moi vous le narrer. Vous êtes allongé dans votre lit, et vous attendez que le réveil sonne pour partir au boulot. Il est 5h59, mais vous vous dites que vous passerez bien quelques minutes de plus au lit. Des coups résonnent brusquement à la porte, c'est la police. Vous ouvrez, on vous menotte, vous emmène au commissariat même pas lavé avec les quelques habits que vous avez pu emmener. On fait venir un avocat qui vous dit, s'il n'est pas bête : « ne dites rien, quoi qu'on vous demande ». Et puis ça s'arrête là pour l'entretien. L'avocat que vous avez vu ne peut rien vous dire de plus, il ne sait pas de quoi on vous accuse exactement. Puis les questions commencent. Jusque là, vous êtes un petit veinard parce que la procédure a été respectée. Les questions arrivent, elles pleuvent sur vous mais vous ne comprenez rien, jusqu'à ce qu'on vous dise de quoi on vous accuse : de la pire des choses, vous avez maltraité un enfant pour votre plaisir sexuel. Ca y est, vous voilà fixé : vous êtes un monstre aux yeux de la police, les gens sur qui vous comptez pour vous protéger pensent que vous n'êtes pas un gentil mouton mais bien le prédateur.

           Je ne vous narrerai pas la suite, la détention « provisoire », la prison et ses horreurs. Si ça n'a pas mérité votre attention, je ne sais pas ce qui peut le faire.

           Mais cette réforme passera. Bien sûr, le Conseil constitutionnel censurera quelques passages bien trop excessifs pour la forme; mais elle passera. Parce qu'à part les avocats, les magistrats et toutes les professions du droit, tout le monde s'en fout. Personne n'ira dans les rues au mois de janvier pour se plaindre. On perd des libertés, peut-être mais moi je m'en fiche, je ne serai jamais de ce côté de la loi, je n'ai rien à me reprocher. Rien ? Personne n'est jaloux de votre réussite, personne ne vous veut du mal ? On perd des libertés, on ne gagnera pas de sécurité. On ne les mérite pas.

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V
<br /> oui, la procédure pénale n'intéresse pas grand monde alors que tout le monde pourrait finir par s'y retrouver confronter un jour ou l'autre...<br /> <br /> malheureusement, le fameux argument du "t'en qu'on a rien à se reprocher" semble encore avoir de beaux jours à vivre...<br /> <br /> Quant à l'article proprement dit, l'article 63 du Code de procédure pénale mériterait moultes commentaires...<br /> <br /> enfin, une petite précision concernant l'entretien avec l'avocat au cours de la garde à vue (art 63-4 du Code pour ceux que cela intéresse)<br /> on est quand même loin de faire venir un avocat<br /> au contraire, il s'agit d'un droit qui peut-être exercé (ou pas) par le gardé à vue... mais la demande ne suspend pour autant la garde à vue... autrement dit, la retenue et les questions<br /> continuent... l'entretien avec un avocat pouvant parfois arriver longtemps, bien longtemps après le début de la détention sans courir le moindre risque d'une queconque nullité de procédure...<br /> <br /> D'ailleurs, au sujet de la garde à vue,<br /> un<br /> autre article de Me Eolas est très intéressant à lire<br /> et aussi : http://www.abolir-gardeavue.fr/<br /> <br /> bon, j'm'arrête là<br /> <br /> <br />
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