Aujourd'hui je tape sur ma tête de Turc depuis deux ans, au sujet de l'examen de la loi pénitentiaire tant promise.
Sensée être un un projet majeur et une urgence de la Justice, elle a été repoussée au moins deux fois depuis. Et ce qui ressort encore une fois, c'est qu'en France
on a plein d'idées, dont l'augmentation du recours au bracelet électronique pour les petites peines de prison, les fins de peine ou les détentions provisoires. Mais le problème, c'est qu'on n'a
pas le pétrole, c'est à dire les moyens financiers. En effet, alors que l'on annonce un recul du PIB cette année (1,5% selon le ministère de l'Economie donc encore moins au final), les caisses
sont bien vides pour doter les prisons de nouveaux équipements. La surveillance sous bracelet coûte cher en moyens matériels (ces petits joujoux ne sont pas gratuits, loin s'en faut), et humains
car elle nécessite une installation à domicile et un suivi régulier. Il y a actuellement un conseiller d'insertion et de probation pour cent détenus, et ça n'est pas prêt d'augmenter puisque la
priorité est de recruter des surveillants de prison.
Au-delà de ça, on examine la loi "en urgence", et rarement le prétexte aura été facile. Pour les profanes, cette procédure permet d'accélérer le mécanisme du vote
devant le Parlement, ce qui a pour effet de réduire la durée des débats. L'ennui c'est que pour ce genre de texte qui risque d'être très sensible, car potentiellement attentatoire aux libertés,
comme tout texte qui organise la détention. La situation est telle qu'elle demande du tact et du doigté, de l'équilibre et de la réflexion, pas une loi qui va échapper en grande partie à l'examen
des représentants de la Nation et suscite déjà des réserves dans la majorité.
Après m'être énervé, la phrase de la journée sera celle d'un de mes professeurs : "Le juriste est un être pessimiste, paranoïaque, et de mauvaise foi". Dès qu'il
entend parler d'un prêt d'argent, il demande si on a pré-constitué un écrit, imaginant les pires choses à venir, mais pas un instant qu'il puisse avoir tort ...
Comment voulez-vous après que ces gens-là soient fréquentables ?